jeudi 14 novembre 2019

L'Attaque des Clowns



Tous les fans de Batman le connaissent, il est l'un des plus importants ennemis du Chevalier Noir, je veux bien sûr parler du Joker ! (Le titre de cet article est un petit jeu de mots en référence à Star Wars. Mais vous aviez compris, hein ?)

C'est sans nulle doute le vilain le plus complexe de l'univers de Batman et c'est pour cette raison qu'il suscite l'intérêt. D'abord, parce qu'il est atteint de démence, ensuite, parce qu'il n'a pas véritablement d'histoire, de nom et enfin, parce qu'il a plusieurs visages. 

Créé par Bill Finger, Bob Kane et Jerry Robinson, le Joker apparaît pour la première fois dans Batman #1 au printemps 1940. Initialement destiné à être tué dès sa première apparition, le Joker devient finalement le pire ennemi de l'homme chauve-souris. 

Bien qu'il soit au centre d'un nombre incalculable de comics, c'est sur ses représentations cinématographiques que je vais m'attarder aujourd'hui, en les comparant. 



Le tout premier Joker au cinéma n'est autre que Cesar Romero, de 1966 à 1968. C'est, pour les lecteurs de comics et amateurs de Batman, la première fois que le Joker prend vie. Cesar Romero en donne une interprétation très théâtrale. Sans trop explorer la psychologie du criminel, son jeu d'acteur, tout en gestuelle et grimaces, le présente à l'écran comme un véritable clown. Transformant sa voix (passant de l'aigu au grave selon les scènes), il renvoie une image très pantomimique en instaurant le rire mythique du personnage. Ajoutée à tous ces éléments : son apparence. Ce Joker de Romero est très classique. Tout vêtu de mauve (oui, car c'est le Joker !), le visage entièrement maquillé, il respecte son alter ego des comics et pose les bases de ce que doit être un Joker au cinéma. 


Le second Joker est celui interprété par Jack Nicholson dans Batman, en 1989. Sous la réalisation de Tim Burton naît l'esprit torturé du Joker. Burton s'approprie véritablement l'histoire du personnage puisqu'il le nomme Jack Napier (première fois que l'ennemi de Batman a une véritable identité). Dans cette version, Jack Napier est présenté comme psychologiquement instable bien avant de devenir le Joker : coupable de meurtre à main armée à l'âge de quinze ans, sujet à de brusques sautes d'humeur et souffrant d'un déséquilibre émotionnel (oui, donc le gars est quand même bien déjanté !). Autre touche personnelle de Tim Burton : il fait de son Joker l'assassin des parents de Bruce Wayne. Jack Napier devient le Joker en tombant dans une cuve d'acide (lors d'un combat contre Batman). Suite à cet accident, son visage est déformé et ne laisse apparaître que cet affreux sourire forcé propre au personnage. Armé d'un poison (le Risex), il tue ses victimes. Bien qu'il s'agisse d'une interprétation très personnelle du Joker, Jack Nicholson s'inspire fortement de Cesar Romero, notamment dans cette apparence de "pantin" dansant, criant et riant à pleins poumons, mais avec davantage de sadisme et de violence. Jack Nicholson reste mon Joker favori, en particulier pour ce passage (il en existe une version de dix heures, mais rassurez-vous, je ne vous ferai pas subir ça) :





Il faudra attendre dix-neuf ans pour voir un nouveau Joker sur grand écran. En 2008, Christopher Nolan réalise The Dark Knight. C'est alors l'euphorie chez les fans de Batman. Le Joker du film sera-t-il aussi bon, aussi fou, aussi cruel que celui de Jack Nicholson ? La réponse est oui. Heath Ledger endosse le rôle du clown tueur avec tant de perfection, qu'aujourd'hui encore, il reste une référence. Tous les éléments constituant un Joker sont présents : le costume mauve, le rire légendaire, le visage peint, les cheveux teints en vert. Pourtant, même s'il s'inscrit dans la lignée de ses prédécesseurs, le Joker de Nolan apporte quelques nouveautés au personnage. Tout d'abord, son sourire n'est pas dû à un bon bain d'acide bien chaud, mais à des cicatrices. Pour les justifier, le Joker donne différentes explications tout au long du film : une fois, il précise que son père l'a défiguré, une autre fois, il prétend s'être lui-même mutilé le visage.  Concernant son rire, il faut noter que ce Joker est hilare en particulier dans les scènes où il se fait "cogner" par Batman. Souffrir le fait rire (et ça, c'est vraiment flippant). La version de Heath Ledger marque un tournant dans l'évolution du personnage au cinéma : Le Joker devient de plus en plus sombre. 


Huit ans plus tard, interprété par Jared Leto, le Joker apparaît de nouveau dans Suicide Squad, réalisé par David Ayer. Bien qu'il semble toujours aussi fou, cette fois, le personnage est très loin des interprétations passées. Certes, son rire est évocateur de sa santé mentale, mais physiquement, il subit un changement radical. Le corps entièrement tatoué (son sourire est d'ailleurs encré sur sa main), des dents en argent, une longue veste mauve très flashy, des chaînes en or autour du cou, ce Joker se rapproche davantage d'un rappeur US bling-bling propriétaire d'un night-club et à la tête d'un gang que d'un clown sanguinaire (même s'il partage de nombreux traits de caractère avec les autres versions). Pourtant, nous apprécions le jeu d'acteur de Jared Leto qui n'hésite pas à faire des courses-poursuites avec Batman et à passer à l'action, en détruisant tout ce qui lui barre la route, pour libérer sa belle Harley Quinn.


Éloignons-nous quelque peu du cinéma et tournons-nous vers la télévision. Le Joker qui suit n'est autre que Jerome Valeska, interprété par Cameron Monaghan, dans la série Gotham. Ici, une fois de plus, nous découvrons un Joker avec une véritable identité et nous connaissons ses parents. Sa mère est une charmeuse de serpents et son père, un médium. Car ce Joker grandit dans un cirque ambulant. Au fil des épisodes, le spectateur fait face à la décadence progressive du personnage qui devient peu à peu une légende à Gotham City, insufflant le gaz extrait de sa folie à tous les délinquants de la ville. (Attention, spoilers !) Lorsqu'il meurt, ses adorateurs sèment le chaos à travers la ville et Jerome revient d'entre les morts. La particularité de ce Joker est qu'il n'a pas une, mais bien deux personnalités. Il a un frère jumeau (vous ne l'attendiez pas celle-là ?). Lorsque Jerome meurt pour la seconde fois (spoilers, spoilers !), son frère, Jeremiah, contaminé par le virus, devient le nouveau Joker. Même si son apparence, dans les débuts de la série, font référence au Joker de Jack Nicholson (costume, chapeau), à la fin de la série, il ressemble davantage à la version de Heath Ledger, apparaissant avec le visage entièrement déformé. Honnêtement, ce n'est pas beau à voir. (Je dois quand même vous avouer que ce Joker est celui que j'apprécie le moins. Je vous prie de ne pas me blâmer.)


Alors, là, nous arrivons au dernier Joker en date. Celui du film du même nom, sorti cette année et réalisé par Todd Phillips (Joker, pour ceux qui n'avaient pas compris). Le personnage est interprété par Joaquin Phoenix qui met tout son coeur à l'ouvrage. Toutes les caractéristiques des Jokers précédents sont regroupées dans son jeu d'acteur. Aussi, son apparence diffère. Plus de déformation physique, de tatouages, de cicatrices, mais un véritable maquillage de clown et, nouveauté : un costume rouge.  Ce film ne nous plonge pas totalement dans l'univers de Batman, mais bien dans les origines du futur ennemi du Chevalier Noir. Ce Joker, dont Phillips donne une version très personnelle, a lui aussi une vraie identité : Arthur Fleck. Arthur, qui ne subit que haine et maltraitance, est employé dans une agence de clowns, mais rêve de devenir célèbre. Bien différent des oeuvres cinématographiques précédentes, ce film est une véritable introspection du personnage. On le découvre, on le comprend, on le voit évoluer et on finit même par avoir de la pitié pour lui. Joaquin Phoenix ne joue pas le Joker, il se l'approprie, il le vit : le rire incontrôlable d'Arthur (causé par sa maladie mentale), son corps qui se déforme comme celui d'un pantin désarticulé, sa souffrance et sa profondeur psychologique qui le font sombrer dans une folie de laquelle il ne peut s'échapper, et ce, jusqu'à ce qu'il commette l'irréparable. Ce film est un spectacle à la fois intense et traumatisant, tant pour le "héros" que pour le spectateur. Arthur Fleck est enfermé dans une prison psychique bâtie par une société abjecte et immorale. Le seul moyen qu'il trouve pour se libérer est de laisser exploser toute sa violence et devenir le Joker

Un seul personnage, six acteurs, six versions. Alors, qui a le mieux porté le Clown Prince du Crime à l'écran ? 
La théorie de l'un de mes amis est que toutes ces interprétations ne représentent pas un, mais plusieurs Jokers (et je suis plutôt d'accord, car ça tient la route). 

Les plus âgés ont vu grandir et évoluer le Joker. Les plus jeunes l'ont découvert. 
Mais, s'il y a bien une chose qu'il faut retenir de ce personnage, c'est qu'il est comme un apéritif dînatoire entre amis : ça se compose de plusieurs petites douceurs que l'on picore, et on adore ! 

Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais en ce qui me concerne, ça me fait bien rire ! Hahah... Hahahah... HAHAHAHAHAH !!!






F.K